A la mémoire du Major Eric Beke.

Permettez-moi, tout d’abord, de présenter, au nom de notre Amicale, nos plus sincères condoléances à Anne-Marie, son épouse et à Catherine, sa fille.

Avec l’accord et l’aide de son épouse, je me suis permis de rédiger ces quelques lignes à sa mémoire, mon commandant d’escadron de l’époque me donnant également différents éclairages de contemporain.

« Au revoir Mon Capitaine »,

C’est toujours avec beaucoup de tristesse que nous voyons partir vers d’autres cieux une figure qui a marqué notre jeunesse. Tant sa personnalité que sa capacité à faire profiter les plus jeunes de son expérience, auront influencé beaucoup de Chasseurs « débutants » des années 80.

Mon premier contact avec Mon Capitaine remonte au mois de janvier 86. Arrivé au quartier le 02, mon commandant d’escadron me fit visiter les autres Escadrons du Régiment et c’est ainsi que je vis C6 pour la première fois. A6 avait directement ajouté que je n’étais pas autorisé à revenir dans ces endroits appartenant à la concurrence.

Les contacts à l’époque entre les sous-lieutenants et les capitaines étaient, comme qui dirait, « limités » mais il m’avait déjà été facile de remarquer quelques traits caractéristiques de C6.

Son calme et sa gentillesse étaient facilement « repérables » ainsi que son rire tonitruant au mess qui marqua bien d’autres unités de cavalerie et états-majors de brigade.

En exercice, son calme, qui n’aurait pu être qu’apparent, ainsi que son ressenti tactique du terrain étaient remarquables. Ses longues journées, des forêts du Sauerland à la Weser, démarraient évidemment avec un excellent café dont j’ai appris bien plus tard qu’il n’était pas uniquement composé d’eau et de café…et de sucres bien sûr.

S’en prendre à ses subordonnés pouvait relever d’une initiative périlleuse. En effet, il avait plus qu’une tendance à les défendre contre vents et marées. Par contre, il m’est revenu que certains de ses chefs de peloton auraient pu souffrir de claustrophobie mais il s’agit sûrement, là, de bruits de couloirs provenant des sous-sols proches de la porte 4.

J’avoue qu’il nous quitta rapidement en 1987 pour aller faire son deuxième cycle à Bruxelles durant lequel il lui aura été parfois compliqué d’appliquer des consignes parfois bien éloignées des réalités tactiques du terrain qu’il connaissait si bien.

A l’issue de celui-ci, Mon Capitaine reprit la formation tactique au Gp CVR-T et je ne saurai jamais si cela le ravit de recevoir trois anciens chefs de peloton de l’Esc A, Junior, Charly et moi-même comme instructeurs à la formation tactique à Stockem.

Cette période m’a permis de découvrir la connaissance parfaite qu’il avait de la tactique Recce que les trois « braves » insolents croyaient maîtriser…Et c’est avec beaucoup de patience et de persévérance qu’il nous corrigea et nous donna de nombreux conseils judicieux pour notre avenir. Il rédigea d’ailleurs, à notre intention, de son écriture claire nette et précise, un addendum au règlement du peloton Recce traduisant en un langage concret et « cristal clear » les principes « un peu » flous du précis « officiel ».

Je crois également que nos « exploits » sur le terrain avec nos élèves ont dû lui coûter quelques insomnies mais nous pouvions dormir tranquilles car nous disposions, grâce à lui, d’une protection antiatomique vis-à-vis de l’échelon supérieur.

Par contre, nous avons chacun fait connaissance avec son 44 « fillette », quand une blague ou un exploit un peu trop corsé méritait une remise à niveau, les virages serrés des couloirs de la tactique nous empêchant de prendre de la vitesse.

Sa très grande franchise et son horreur du mensonge lui auront parfois joué des tours. A l’époque, il n’était guère « autorisé » de se permettre d’apprécier les critères d’évaluations d’inspections. Son caractère « entier » l’aura toujours empêché de jouer la comédie et de prétendre faire des choses qui lui semblaient d’une inutilité « crasse » lors des « fameuses » inspections de commandement et ceci parfois au grand désarroi de ses chefs…

Des années plus tard nos routes se sont encore croisées à l’EM de la 17 Bde à Spich où il veillait avec beaucoup de gentillesse sur l’escadron 4 ChCh et justifiait auprès de son chef les frasques que nous aurions bien pu commettre.

Sa carrière avançant, il s’était rapproché quelque peu des Ardennes et nous nous sommes retrouvés une dernière fois à MeF.

Les hasards de carrière ont fait qu’alors nous portions le même grade. Il me demanda ainsi de l’appeler « Éric » et je dus lui avouer qu’il me serait impossible d’obtempérer car il resterait toujours pour moi « Mon Capitaine » du temps jadis qui avait, avec d’autres, guidé mes premiers pas dans la famille « Chasseurs à Cheval ».

Une fois parti à la retraite, il ne s’arrêta pas de travailler et s’occupa de la gestion informatique des stocks d’une société bertrigeoise ayant entamé sa numérisation.

Toujours levé aux aurores, il consacra ses journées, ses 65 ans bien frappés, au suivi des situations belge et étrangère, au jardinage, à la lecture, à son chat et fût déclaré « expert » en préparation de petits-déjeuners par toute la maisonnée.

Quant à ses voyages, le Harz avait été avantageusement remplacé par l’Écosse, la Normandie ou la Toscane.

Survint janvier 21 et le diagnostic d’un « crabe » dont il vaincu les deux premières offensives. Début 24, une nouvelle offensive fut découverte et cette fois-ci, il dut rendre les « armes » et bien malheureusement nous quitter ce 24 juin.

Mon Capitaine, bon vent et de là-haut, continuez bien à veiller sur nous.

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